⚖️ Inaptitude d’origine partiellement professionnelle : la Cour de cassation statue

Le 7 mai 2024, la Cour de cassation a statué sur un différend qui opposait une entreprise et l'un de ses salariés concernant un licenciement pour inaptitude. Cette affaire met en lumière les enjeux liés à la détermination de l'origine professionnelle de l'inaptitude et l'application des règles protectrices correspondantes.

Dans cet article

Contexte et enjeux

Qu’est-ce que l'inaptitude professionnelle d'un salarié ? Il s’agit d’une situation où l'état de santé du salarié, qu'il soit physique ou mental, est jugé incompatible avec le poste occupé.

Cette inaptitude peut résulter d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle, ou encore de causes non professionnelles. La reconnaissance de l'origine professionnelle de cette inaptitude revêt une importance particulière, car elle ouvre droit à des indemnités spécifiques pour le salarié concerné.

Procédure de reconnaissance

Pour qu’un salarié soit déclaré inapte par le médecin du travail, plusieurs étapes sont à suivre :

  • Examen médical : Le médecin du travail doit réaliser un examen médical et une étude du poste de travail du salarié. Si aucune adaptation du poste n'est possible et que l'état de santé justifie un changement de poste, l'avis d'inaptitude est rendu.
  • Recherche de reclassement : L'employeur est alors tenu de rechercher un poste de reclassement pour le salarié. Si aucun poste n'est compatible avec l'état de santé du salarié, ou si le salarié refuse les propositions de reclassement, l'employeur peut procéder au licenciement.

Conséquences de la reconnaissance de l'origine professionnelle

La reconnaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude a plusieurs conséquences :

  • Doublement de l'indemnité de licenciement : Le salarié bénéficie d'une indemnité de licenciement doublée par rapport à celle prévue en cas d'inaptitude non professionnelle.
  • Indemnité compensatrice : Le salarié perçoit une indemnité compensatrice de préavis, même s'il n'est pas en mesure d'exécuter son préavis.

Jurisprudence et critères

Le 7 mai 2024, la Cour de cassation a statué sur un différend qui opposait une entreprise et l'un de ses salariés concernant un licenciement pour inaptitude. Cette affaire met en lumière les enjeux liés à la détermination de l'origine professionnelle de l'inaptitude et l'application des règles protectrices correspondantes.

Que s’est-il passé ?

Dans cette affaire, un salarié engagé en tant que chauffeur poids lourds par l'entreprise en septembre 2002 a subi un accident du travail dix ans plus tard. Lors de sa visite de reprise en mars 2015, il a été déclaré inapte et, par la suite, licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Qu’avaient dit les juges en appel ?

La Cour d'appel de Montpellier avait initialement reconnu, le 24 novembre 2021, une origine partiellement professionnelle à cette inaptitude, en se basant sur la continuité des symptômes depuis le premier arrêt de travail lié à l'accident du travail.

Toutefois, l'employeur a contesté cette arrêt et a formé un pourvoi en cassation. Il a fait valoir que le salarié avait également eu des arrêts maladie non professionnels après l'accident, sans demander la prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (AT/MP). L'entreprise a soutenu que la décision de la Cour d'appel manquait de base légale dans la mesure où elle n'avait pas démontré que l'employeur était informé de l'origine professionnelle de l'inaptitude au moment du licenciement.

Quelle a été la réponse de la Cour de cassation ?

La Cour de cassation a estimé que “les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement”. En l’espèce, l’employeur avait bien connaissance du fait que l'accident du travail était à l'origine du premier arrêt de travail du salarié et que celui-ci n’avait   jamais repris le travail depuis.

Source : Cour de cassation, Chambre sociale, arrêt nº 454 du 7 mai 2024, Pourvoi nº 22-10.905